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Nouveaux outils pédagogiques : Débat sur l’encadrement militaire des jeunes délogeurs

Photo du rédacteur: lci focuseduclci focuseduc

Source photo: Site internet de l'Office du service national (OSCN)




Suite aux évènements scandaleux du mois de décembre mettant en scène des élèves délogeurs dont la revendication n’était autre que des congés anticipés, le ministère de l’éducation s’est vu dans l’obligation de réagir. Des biens scolaires ont été détruits et des personnes blessées, de tels actes ne pouvaient rester impunis.


Les fauteurs de trouble ont été transférés au centre du service civique de Bimbresso. Selon le site internet fratmat, 172 personnes (dont 5 filles) ont arrêtées mais seulement 70 d’entre elles (dont trois filles) ont fait l’objet dudit transfert. Toujours selon la même source, cette décision a été prise pour que les élèves bénéficient d’une « resocialisation » et pour ce faire, « ils seront donc formés à la discipline, au respect des institutions de l’État et les personnes qui les incarnent. Et ce, durant neuf mois ». La ministre de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation, Mariatou Koné, en déplacement sur les lieux en compagnie du ministre de la Promotion de la jeunesse, de l’Insertion professionnelle et du Service civique, Mamadou Touré, explique que : « Nous les avons envoyés ici afin qu’ils prennent conscience de l’erreur qu’ils ont pu commettre, qu’ils prennent conscience de l’importance de l’école. Nous espérons qu’au sortir d’ici, après le passage en conseil de discipline, certains en fonction des fautes commises pourront regagner l’école ». Monsieur le ministre, Mamadou Touré, précise que « Nous sommes venus nous imprégner de la prise en main de ces enfants qui ont eu d’abord un contrôle médical. Ensuite vous avez des encadreurs militaires qui vont leur inculquer la discipline, le respect de soi-même, de l’environnement, de l’autorité ». Il rajoute : « Nous estimons qu’il faut mettre un dispositif d’alerte en place pour détecter ces enfants qui présentent des risques et les mettre dans un dispositif d’encadrement pour ne plus qu’ils soient une menace pour l’environnement scolaire. Nous allons vous proposer quelques écoles pilotes ». De plus, lors de cette visite, la ministre Mariatou Koné n’a pas omis de rappeler la responsabilité des parents.


La ministre a évoqué les sanctions qu’encourent ces élèves : l’exclusion temporaire, la radiation du système éducatif ivoirien mais également une « pénalité » pour les parents des élèves responsables : ces derniers devront supporter les frais de réparation des dégâts du matériel des établissements.


Mais les décisions prises par madame la ministre suscitent quelques critiques, notamment celle concernant les parents. Un débat fait rage sur les réseaux sociaux : Les parents doivent-ils être sanctionnés ? S’agit-il d’un moyen de les responsabiliser et de rappeler leur rôle dans l’éducation des enfants ?


Aussi, un internaute, en plus d’être contre le transfert dans le centre du service civique de Bimbresso qu’il qualifie de « petite formation » en comparaison à la gravité des actes commis par les délogeurs qui s’en sont également pris aux policiers, dénonce la médiatisation des jeunes transférés au camp. Il explique qu’« aucune vidéo ni image ne devrait fuiter de « cette formation […] Mais nous avons vu un dispositif de reportage bien huilé digne d’un reportage télé. Voilà que ces élèves voyous passent aujourd’hui en boucle sur les réseaux sociaux et à la rentrée ils seront des stars. En pâques, d’autres élèves voyous voudront les imiter et aller aussi en formation et être reconnus à l’école. C’est l’effet boomerang de ces fuites de vidéos et images. En tant que parent d’élèves, l’idéal aurait été que ces élèves voyous passassent en conseil de discipline et non faire d’eux des stars et experts en délogement ».


Monsieur Michel Gbagbo, député de Yopougon commune, s’interroge et le fait savoir. Il s’insurge contre la décision prise par les institutions de remettre les élèves délogeurs aux militaires. Le site internet ivoirebusiness rapporte certaines questions émises par le député : « Quel est le statut juridique de ces jeunes ? Sont-ils dans un camp militaire ou comme on le dit dans un centre de "redressement" civique suite à une décision de justice ? Cette peine est-elle prévue par la loi ? Quel tribunal l'a décidé et quand ? […] Mettre des enfants à genoux en plein ensoleillement au drapeau dans leur lycée relève-t-il d'une décision de justice ? […] Enfin ... Même si ces actes institutionnels étaient réguliers, que fait-on dans ce cas du devoir de protection de l'identité de ces élèves mineurs ? Ont-ils donné eux et leur parent autorisation pour une telle exposition médiatique sur les réseaux sociaux notamment de leur identité ? ».


Mais dans un communiqué officiel en date du 29 décembre 2021, le Conseil national des droits de l'homme (CNDH) a approuvé la décision. Effectivement, le communiqué indique que « Le CNDH a constaté que le centre de Bimbresso dispose d'infrastructures adéquates pour la resocialisation des élèves […] ces pensionnaires sont soumis à des activités de resocialisation et de discipline, telles que l’entretien de leur milieu de vie, le ménage, les rangements. Ils suivent également des enseignements sur la citoyenneté, le civisme, le développement de l’empathie et l’appropriation des valeurs républicaines ». Est rajouté que « Le Conseil note enfin que son équipe n’a relevé aucun traitement susceptible d’être jugé inhumain ou dégradant, ni aucun acte ou signe de maltraitance sur les élèves pensionnaires avec lesquels elle s’est longuement entretenue ». Par contre, il préconise le retour des élèves à l’école à la fin des congés : « le CNDH recommande aux autorités de permettre à ces élèves la réalisation de leur droit à l'éducation en les autorisant à rejoindre leurs établissements scolaires respectifs à la reprise des classes, le 3 janvier 2022 ».


La question de remettre les élèves, indisciplinés ou délinquants, aux militaires en vue d’un « redressement » n’est pas nouvelle. Cette pratique est effective dans certains pays et fait débat dans d’autres. En France, par exemple, il s’agit d’une question épineuse qui, régulièrement, revient au-devant de la scène politique, tout comme celle du service militaire obligatoire.


Le site internet zonemilitaire déclare que « Manquait plus que l’encadrement militaire des fauteurs de troubles récidivistes, maintes fois proposé par le passé par des élus de droite comme de gauche. En 2007 puis en 2011, Ségolène Royal (PS) avança une telle idée. De même qu’Éric Ciotti (LR), à l’origine d’une proposition de loi imposant aux délinquants âgés d’au moins 16 ans d’effectuer un « service citoyen », d’une durée de six à douze mois, au sein des Établissements publics d’insertion de la Défense (EPIDE) ». D’ailleurs, la source rappelle que « les dispositifs d’insertion faisant appel à un encadrement militaire (Service militaire volontaire, EPIDE, etc), qui, par ailleurs, obtiennent de très bons résultats, s’adressent aux jeunes adultes dits « décrocheurs » et reposent sur le volontariat ». Mais le ministre de l’éducation français, M. Blanquer, insiste : « Nous avons besoin, pour les 13-18 ans, de structures dédiées solides, encadrées par des personnes qui peuvent venir de différents corps de métiers, aussi bien de l’Éducation nationale que, par exemple, de l’armée et de la police. C’est quelque chose qui n’est pas exclu […] Le fonctionnement des EPIDE repose sur le volontariat. Mais demain, on peut imaginer que pour les 13-18 ans, on ait quelque chose qui soit obligatoire pour les élèves qui feraient l’objet de sanctions disciplinaires ». D’ailleurs, le site dallozactualite informe qu’en 2020 « M. Dupond-Moretti [Ndlr : M. Dupont-Moretti est le Ministre de la justice en France], a proposé, lors d’une rencontre avec la ministre des armées, Mme Florence Parly, que des partenariats se nouent entre leurs deux ministères, dans le but d’encadrer des jeunes mineurs et majeurs délinquants ». D’après la même source, les camps militaires existent, depuis de nombreuses années, dans d’autres pays : « Les boot camps sont d’abord apparus aux États-Unis au tout début des années 1980 (1983 en Géorgie et dans L’Oklahoma) et se sont ensuite développés dans les années 1990 aussi bien aux USA que dans d’autres États anglophones (Australie, Angleterre, Canada) ».


D’autres alternatives existent également : les internats pour adolescents difficiles, les dispositifs relais (classes et ateliers relais) qui accueillent des élèves en voie de déscolarisation et de désocialisation, etc. Nous y reviendrons dans un prochain article.


Alors, vous êtes plutôt pour ou contre l’encadrement militaire des élèves perturbateurs comme les délogeurs ? Pensez-vous que le service militaire obligatoire soit une solution adéquate pour répondre à la montée de la violence, de l’incivisme et de l’irrespect dans nos écoles ?


La parole est à vous !


S. Grié-Hazoumé




Pour information : Présentation et information d’admission au service civique d’action pour le développement






Source: Site internet de l'Office du service national (OSCN)



Le directeur général de l’Office du service national (OSCN), Touré Mamadou, souligne, au sujet de l’OSCN, que : « Nous ne sommes pas un dispositif de répression mais plutôt un dispositif d’éducation ». (Propos recueillis par Fratmat)




Sources :




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